10 SEPTEMBRE 2016 – HOMMAGE AU 1er BATAILLON DE CHOC ET À SES HOMMES MORTS POUR LA FRANCE - ACCUEIL ET ALLOCUTIONS
|
|
À l'initiative de Raymond Valli, délégué Est/Nord-Est des Anciens du 1er Bataillon de Choc, une cérémonie d’hommage aux ‘’Morts pour la France’’ s'est déroulée au pied de la chapelle Notre Dame du Haut, devant la stèle qui rappelle l'implication de cette unité d'assaut aux combats de la libération de Ronchamp. Le 22 mai 1943, est créé le bataillon de choc à Staouéli près d'Alger. Aux ordres de son premier chef de corps, le Cdt Gambiez, il devient la première unité commando de l'armée française reconstituée. Allocution; accueil des participants par Raymond Valli. Mesdames, Messieurs, chers amis, Je suis extrêmement honoré, fier mais aussi très ému d'accueillir aujourd'hui une assemblée aussi nombreuse que distinguée, venue pour une grande part de tous les coins de France, mais venue aussi pour la première fois ici, au pied de la Chapelle de Ronchamp, afin de se recueillir en ces lieux où les hommes du Bataillon de Choc tombèrent au cours des violents combats menés il y a 72 ans pour libérer cette colline. Oui, 72 ans presque jour pour jour puisqu'ici, le 30 septembre 1944, trouvèrent la mort le Capitaine Léon Lamy qui commandait la 3e Compagnie, le Sous-lieutenant Yves de Bernon, chef de section, ainsi que six chasseurs du Bataillon dont malheureusement les noms ont été perdus à jamais. Les allocutions qui vont suivre, notamment celle d'Alain Banach, décriront par le détail les différentes phases des combats qui coûtèrent la vie à ces 8 hommes. Mais avant cela, je tiens à saluer toutes les personnes, toutes les personnalités qui ont fait le déplacement jusqu'à Ronchamp afin d'honorer la mémoire de nos Anciens disparus et de leur rendre un vibrant hommage. Je salue les membres des familles Lamy, Morel, Plantevin, Pignal, proches de Léon Lamy, et en particulier: ---sa fille, Madame Mireille Fatouma AUSSEIL, ancienne ministre et ambassadrice de la République du Niger -son mari le colonel Pierre AUSSEIL, l'un et l'autre membres du Corps Diplomatique de la République du Niger Déroulement de la cérémonie -----accueil de l’assemblée par Raymond Valli Allocution de Didier Lamy Nous sommes aujourd’hui, avec ma sœur Françoise les ainés des neveux de Léon Lamy. Au nom de sa famille élargie aux familles alliées en m’associant à Mireille Ausseil sa fille ici présente je me permets ces quelques mots : Nous sommes ici sur ce lieu mythique de Notre Dame du Haut où le jour de l’inauguration de cette nouvelle chapelle Le Corbusier précise « J’ai voulu créer un lieu de silence, de prière, de paix, de joie intérieure ». En ce lieu sacré il y aura 72 ans le 30 septembre jour où le cœur de Léon Lamy et d’Yves de Bernon ont cessé de battre, ce fut ici pour eux comme avant beaucoup de leurs camarades de combat le bout d’une course infernale pour la liberté dont nous jouissons aujourd’hui. Ils étaient jeunes plein d’idéal et d’avenir, Léon avait 29 ans, Yves 26 ans. Leur course folle payée au prix fort ne s’est pas arrêtée là, leurs compagnons fidèles partageant les mêmes valeurs ont continué le combat avec la même fougue, la même intensité, si ce n’est plus forte encore jusqu’à la capitulation de l’enfer pesant sur notre peuple, sur notre civilisation. C’est l’engagement de Léon qui nous rassemble ici, et par ricochet celui de Tom Morel son beau-frère, de Jean son frère, mon père, seul rescapé de cette époque et d’autres membres de notre famille qui ont laissé un fort tribu dans cette guerre. Léon, Tom et Jean, trois jeunes officiers, ne supportant pas la tragédie se déroulant sous leurs yeux, ni le déshonneur, ni la défaite se sont rencontrés fin 1942 à Aix en Provence juste après l’invasion de la zone libre pour décider de leurs actions mutuelles. Tom et Jean ont rejoint la résistance Haut savoyarde au cœur du berceau familial dans l’armée secrète, quant à Léon, le méhariste, très attaché à l’autre rive de la Méditerranée, fit le choix de rejoindre l’armée d’Afrique et rejoint ainsi le bataillon de choc du colonel Gambier à Staouéli. L’engagement de chacun était intégral et solidaire. Ils ont bercé notre tendre enfance et ont façonné en nous la soif de liberté, l’esprit d’entreprendre, l’engagement indéfectible dans les choix fondamentaux avec réflexion, rigueur morale, respect de l’autre. À propos de la fonction de chefs qu’ils assumaient je vous rapporte le témoignage que j’ai reçu personnellement d’un rescapé des Glières, il m’a dit ceci : « Si j’ai eu une vie droite c’est parce que je suis tombé sur des chefs de grande valeur ». En ces quelques mots ce jour-là cet homme m’avait tout dit. Tels étaient Léon, Tom et Jean. De Léon, que malheureusement notre génération n’a pas connu, la vision qui nous en a été transmise par ceux qui l’ont connu, plus particulièrement par Jean son frère, nous avons celle d’un homme engagé, volontaire, sans compromis, celle d’un homme qui ignorait la peur comme je l’ai entendu de ses compagnons d’armes. Je crois plutôt qu’il ne la montrait pas responsable de la vie des hommes qui lui étaient confiés et qu’il aimait profondément. Ces hommes lui rendaient bien. Il nous est aussi décrit un homme au charme fou, plein de vie, un homme assoiffé de grands espaces qui l’avait conduit avant-guerre aux confins du Niger dans les unités méharistes, un artiste aussi dont on perçoit à travers les dessins qu’il nous a laissé une grande sensibilité, de l’humour, de l’observation, de la netteté, un trait précis, une grande liberté d’esprit. Tout cela avec une foi à soulever les montagnes dans la mission qui lui était confiée, et quelle mission ! « En pointe toujours » pour la vie, pour la liberté, pour la France. Tous ici nous sommes fiers d’honorer la mémoire d’un parent, d’un chef, d’un compagnon d’armes, d’un ami, bref d’un homme hors du commun : Léon Lamy. Léon, comme tous ceux qui se sont engagées comme lui sont des graines de vie tombées en terre, ne les oublions pas, cultivons-les, c’est notre blé, ce sont nos fleurs d’aujourd’hui et de demain. Allocution de Régis de Bernon Aujourd'hui, 10 septembre 2016, mon frère Yves, né le 10 septembre 1913, aurait 98 ans ! Je vais l'évoquer un peu en citant quelques noms et quelques faits, et le fêter. Aujourd'hui aussi, c'est l'anniversaire (peut-être à un jour près) de la grande blessure du sous-lieutenant Glavany à Dijon en septembre 1944, l'un des derniers survivants de ces combats desquels il va être retiré par cette blessure. Yves et lui furent infiniment proches de mai 1943 à septembre 1944. Et dans les jours qui suivent cette blessure, Lamy et Yves vont lui dire adieu sur son lit d'hôpital à Beaune, instants très émouvants, car ce sera la dernière fois et ils l'ont bien senti ... Maintenant des noms du Bataillon que je tiens à vous citer : - Michelin, tué à l'été 1943 en Corse, Jeanneney tué en avril 1945 en Allemagne et Yves... Ils avaient fait entre eux le pacte d'avertir la famille si quelqu'un tombait. Et tous trois tombèrent successivement. - Un autre nom : Bacot, tué à l’ile d'Elbe en 1944. Sa sœur épousera mon frère ainé, Pierre, qui avait été en captivité à Berlin pendant 5 ans de 1940 à 1945. - Et Georges Schlumberger, une des figures du Bataillon, qui mourut à Servance, à deux pas d'ici, quatre jours après Ronchamp. C'était celui qui était parti en canot vers l'Espagne avec Brousse, son ami. - Mais encore les noms de deux qui viennent de mourir en 2015 : Poulard et Demont. Ils m'avaient montré les lieux des combats, ici même, en dessus de la Chapelle. Tous deux étaient des hommes de la section de mon frère. Demont avait été blessé ici. Quelques faits concernant ces combats, ici même. Faits qui m'ont été rapportés directement. En 1984, j'avais retrouvé le Bataillon avec un autre de mes frères, Xavier. On me dit d'aller voir le général Gambiez, au Service Historique de l'Armée, à Vincennes, ce que je fis. Et celui-ci me parla de cette guerre comme si c'était la veille. Il me raconta plusieurs anecdotes concernant mon frère et il me dit tristement : « Malheureusement, ce n'est pas moi qui commandais à Ronchamp. Je n'aurais pas laissé faire ça... » Comme le dit Muelle dans ses livres, le Bataillon n'était plus du tout employé comme une arme d'Elite... « Que peut-on faire sous les obus, sinon mourir ? ». Un autre fait ici même : Le capitaine de l’Escaille (avec lequel je vins ici) de la compagnie du Beaujolais qui secourait les Zouaves, venait de faire connaissance avec mon frère. Et ils se questionnaient sur leurs liens de famille, car nous étions apparentés. L'instant d'après, mon frère était mortellement blessé et le capitaine en prenait plein la figure... Vous pensez avec quelle émotion, il me retrouvait 40 ans après ! Enfin : le soldat du Bataillon en 1984, si heureux de retrouver des frères de son lieutenant pour leur raconter ceci qu'il gardait dans son cœur depuis 40 ans : « Lorsque tous apprennent en ce 30 septembre 1944 que le lieutenant et son capitaine sont mortellement blessés, stupeur et tristesse. Mais en même temps, le soldat en question est appelé par mon frère. Il se demande ce que le lieutenant peut avoir à lui dire en un tel moment : mon frère voulait lui demander pardon d'avoir été trop sévère avec lui, 2 semaines plus tôt à Dijon. Et ce soldat me disait : « Lorsque ton frère allait mourir, au lieu de penser à lui, il voulait me demander pardon ! Te rends tu comptes ! » Tels étaient les hommes du Bataillon ! Et je dis que le soldat valait son lieutenant. |