10 SEPTEMBRE 2016 – HOMMAGE AU 1er BATAILLON DE CHOC ET À SES HOMMES MORTS POUR LA FRANCE - ALLOCUTIONS - DÉPÔTS DE GERBES – REMERCIEMENTS AUX PORTE-DRAPEAUX
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Allocution d'Étienne Plantevin, cousin du Capitaine Léon Lamy |
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Le « Bataillon de choc » et « La « Chapelle de Ronchamp » font remonter dans ma mémoire des souvenirs d’enfance empreints de bonheur et de tristesse à la fois. Nous sommes début septembre 1944, dans le sud de l’Ardèche. Depuis le débarquement et les premières batailles de Provence, sans radio, téléphone ni journaux, les informations ne nous arrivent qu’imprécises et tardives. On sait que Marseille et Avignon ont été libérées... Les sourdes et incessantes explosions de la bataille de Loriol se sont enfin arrêtées... Les armées Françaises et Américaines ont du entreprendre leur progression vers le nord de la vallée du Rhône. Le dimanche 3 septembre, nous sommes réunis dans l’une de nos familles. Parmi nous se trouvent Marie Germaine Morel, Gilberte lamy et leurs enfants, réfugiées pour échapper aux menaces de la Gestapo d’Annecy... Le lieutenant d’aviation Jean Lamy, chef de l’Armée Secrète dans le secteur de Thônes, arrêté en avril 1943, avait réussi à s’évader et avait disparu... Le lieutenant de Chasseurs Alpins Tom Morel, membre de l’Armée Secrète de Haute Savoie et chef du maquis des Glières, avait été tué le 10 mars lors d’un accrochage avec des hommes de la police de Vichy. En début d’après-midi, arrive une voiture. En sortent quatre jeunes militaires, impeccables dans leurs tenues claires... Le capitaine Léon Lamy se dirige vers nous, le sourire aux lèvres... Effusions, intenses émotions, joie immense. On était sans nouvelles de lui depuis son évasion de France en janvier 1943. Le Bataillon de Choc faisant route vers Lyon, il n’avait pu résister à l’envie de faire une rapide visite à sa famille. Il présente les hommes qui l’accompagnent : ses deux compagnons les plus proches, les sous lieutenants Yves de Bernon et Roland Glavany et un soldat chauffeur corse, Doume Gucchi. Il sait la mort de Tom Morel et s’isole un moment avec Marie Germaine. Il donne à Gilberte des nouvelles de Jean qu’il a vu en Corse au mois d’avril. Il avait pu rejoindre l’Algérie en décembre 1943 et avait intégré l’Aviation Française. Il ne devrait pas tarder à être basé en France. Ses trois compagnons nous parlent du Bataillon de Choc. Ses volontaires de toutes origines. Leur engagement absolu pour la Libération de la Patrie. Leur intense et dur entrainement de « commandos » ... Ils ont libéré la Corse en trois semaines... Sont montés de nuit à l’assaut des falaises de l’Ile d’Elbe et de ses redoutables batteries d’artillerie qu’ils ont détruites à l’explosif... A Toulon leurs audacieuses manœuvres contre la « Poudrière » et le « Mont Faron », leurs attaques surprises dans le centre-ville et leurs combats de rues ont désorganisé la défense de l’ennemi et précipité sa reddition... Leurs équipes parachutées dans le Var et la Drome avant le débarquement ont encadré les « maquisards » des Forces Françaises de l’Intérieur, harcelant l’ennemi sur ses arrières, le déstabilisant, permettant ainsi une progression plus rapide des Américains vers la vallée du Rhône et vers Grenoble... Ils nous disent leur fierté d’appartenir à cette unité exceptionnelle. Nombreux sont leurs camarades tombés au combat. La famille éprouve un sentiment d’allégresse, une immense admiration et gratitude pour ces Libérateurs. Tout le monde a le cœur serré quand ils reprennent leur route ... Léon avait laissé comprendre qu’on pourrait ne pas le revoir. Deux semaines plus tard, le Bataillon de Choc libérait Dijon. Les 9 et 10 septembre la compagnie Lamy avait dû mener de durs combats. Le lieutenant Glavany avait été grièvement blessé. Début octobre, j’avais rejoint mon collège et recevais une lettre de ma mère me disant que Léon avait été tué le 30 septembre à la Chapelle de Ronchamp au sud des Vosges, avec plusieurs de ses hommes. J’en ressentis une grande douleur que je ne pus dissimuler à mes maîtres et camarades qui la partagèrent... Au cours des offices de la Toussaint quelques jours plus tard, de très ferventes prières furent dites pour le repos de leurs âmes. Il y a quatre ans, Jean Paul Lamy, moi-même, Mireille et Pierre Ausseil avons été chaleureusement reçus par trois anciens compagnons de Léon, le Général Roland Glavany, Charles Coache et Gérard Berkovitz. Ils avalent une grande vénération pour leur ancien capitaine. Ils nous firent découvrir la force qu’il portait en lui et qu’il avait su communiquer à ses hommes : « Droiture, exigence, recherche de perfection et d’absolu, ardeur, courage, maîtrise et don de soi – Amour de la vie, gaité, sensibilité, grande affection et attention pour ses hommes, modestie » – Et en plus : « de l’élégance, du panache et, bien que difficilement perceptible, une profonde spiritualité ». Qualités caractéristiques sans doute de cet « Esprit Choc » qui avait animé leur exceptionnelle communauté et qu’ils gardaient ancré au fond d’eux-mêmes. Après Ronchamp le Bataillon connut six mois de très durs combats et de souffrances, sous la pluie, la neige, par un froid glacial, pour la libération du sud des Vosges, de Belfort, de la Haute Alsace et de Colmar. Puis ce fut la traversée du Rhin le 2 avril 1945 au nord de Strasbourg, suivie d’autres intenses combats sur le sol Allemand qui allaient le conduire jusqu’en Autriche, au-delà du Lac de Constance... Le 8 mai 1945, le Bataillon avait atteint le col de l’Arlberg. En 21 mois de campagnes, 278 de ses hommes avaient été tués, 800 avaient été grièvement blessés. Très lourd tribut pour un effectif constant de 750 hommes. Très significatif de son total engagement dans les missions qui lui étaient confiées - « les plus difficiles » - dans la lignée de sa célèbre devise : « En pointe toujours ! ». En pensant plus particulièrement à ceux qui tombèrent ici même, en ce lieu sacré et si symbolique, rendons aujourd’hui hommage à tous ces hommes du Bataillon de Choc qui s’engagèrent et à ceux qui se sacrifièrent pour abattre un des « totalitarismes » les plus pervers, faire triompher la « Liberté » et la rendre à notre Pays. Ayons aussi une pensée pour deux autres de nos proches: Après l’allocution d’Etienne Plantevin, trois gerbes ont été déposées au pied des stèles. La première est déposée par Daniel Pautot et Jean-Claude Besse, président de la section 70 de l’UNP (Union nationale des parachutistes). La seconde est déposée par les familles Lamy, Ausseil, Morel et Plantevin. La troisième, pour le 1er Choc et CNEC, par Marc Bermot, Théo Graber, le colonel Roger Fix et Raymond Valli. Après la sonnerie ‘’Aux Morts’’ et l’Hymne National, le Maire Jean-Claude Mille a invité tous les participants à partager le verre de l’amitié à la salle des fête Georges Taiclet. Le maitre de cérémonie a ensuite invité tous les officiels à venir saluer et remercier les porte-drapeaux. Un peu plus tard toute l’assemblée s’est dirigée vers la chapelle, porte-drapeaux en tête pour une messe du souvenir. |